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Première fois au Vergoin !

Tu veux suivre le processus de création de Une autre cerisaie ?

Voici les premières impressions de l'équipe artistique sur la cerisaie du Vergoin sous la forme d'un "mini roman" :

Le point de vue de Solène Krystkowiak:

« Combien de fois me suis-je rendue à cette Cerisaie ? Je ne sais plus. Et d’ailleurs c’était quand la dernière fois ? Je ne sais plus. Avec qui ? Qu’est-ce que j’ai pensé des arbres la première fois ? Je n’en sais rien. Je sais pas ça ne m’a pas marqué.

Ah si, en écrivant ça me revient.

C’était avec Thibault en plein mois de Juillet pour prendre des photos. Il faisait super chaud. Je me souviens qu’on avait pris un chemin improbable, Google Map n’expliquait pas comment venir. On a coupé par des parkings, des pans d’herbes et de déco…

La deuxième fois je m’en souviens précisément. C’était pour faire visiter le lieu à Anaïs, Guillemette et Béatrice. Dans la voiture, Anaïs me proposait de pique-niquer sous les cerisiers. Je me souviens avoir été réticente à cette idée : s’installer là, faire comme chez nous …

Aujourd’hui, ça me ferait plaisir de le faire, manger là-bas, aux cerisiers et recroiser les personnes avec qui j’ai beaucoup discuté du quartier.

D’ailleurs, pourquoi ne l’a-t-on pas fait en février dernier, quand il faisait très chaud et qu’on était en résidence à la chaufferie ? Pourquoi a-t-on préféré installer une table au milieu du parking en face du local, plutôt que de profiter de la verdure et des arbres de cet endroit? Paresse ? Sentiment d’illégitimité ? Je n’en sais rien. En tout cas, ça ne nous est même pas venu à l’idée.

En tout cas, je n’y ai fait que passer. On s’y est attardé.e.s plusieurs fois pour regarder. Mais jamais on ne s’est installé.e.s.

Je ne crois pas que les gens s’y installent. Les jeunes qui squattent sont souvent à l’entrée du verger, vers le muret où on peut voir des mégots, des bouteilles en plastique, parfois des traces de barbecue sauvage. Mais je ne crois pas qu’ils s’installent dans l’herbe.

Ça changera cet été ? Ça changera l’année prochaine ?

Les cerisiers commencent à donner leurs premiers fruits. Sur certains, de petites cerises sont déjà pourries. On a spéculé, supputé...

Le froid ? Les sources d’eau polluées ? Il faudra mener l’enquête.

Mais c’est flippant non ? Enfin flippant... Non mais on mène tout un projet et ces fucking cerisiers sont pas foutu de donner des cerises ? C’est quoi le symbole ? Heureusement certains ont l’air de faire un effort. Merci les gars. Les autres, on vous en veut pas. C’est pas votre faute. Mais quand même.

Je me demande ce que pensent Margot, Raymonde, Amaëlle, Alice et Bouvier de l’endroit. On va bien voir. Et le Ginkgo qui penche du côté de la route. Il est beau gosse, mais il faudra peut-être lui couper les branches. Je n’ai pas le temps de trop écrire sur le Ginkgo. Un autre exercice à penser pour une répet sur le Ginkgo ? »

Solène Krystkowiak

Le point de vue d'Alexis Bouvier:

« Nous sommes allé.e.s à le cerisaie, il était 11h. Sur le trajet j’ai parlé avec Solène mais surtout avec Alice. Elle m’a confié qu’elle n’avait pas travaillé de la semaine, j’ai dit « moi non plus ».

Il fait beau, ça contre balance mon premier souvenir de la Cerisaie. J’avais trouvé l’endroit sombre et oppressant. Il y a des cerises vertes, il y en a certaines qui ont rougi et qui ont pris de taches noires, elles ont l’air pourries. Ce serait drôle que les arbres chopent tous la maladie et que le premier été des nouveaux cerisiers il n’y ait rien à récolter. On maîtrise pas la causalité, on n’est pas sûr que les cerisiers produisent des cerises, on n’est pas sûr qu’elles soient bonnes, on n’est pas sûr que les gens du quartier seront contents d’en manger.

Au sol il y a des pâquerettes, des bouts de plastique et des champignons. J’ai mal au ventre mais je me sens plutôt dans mon élément. En plus comme j’ai ma veste noire trop grande qui ne ferme pas, j’ai envie de danser et de lancer quelques phases de rap. L’habit provoque l’état d’esprit.

Il y a des arbres souffrants à côté de beaux arbres bien en vie. La demeure du noble me fascine car les vieilles bâtissent et les vieux nobles me fascinent. Ça me donne envie d’écrire un roman.

On a vu le Gingko qui est effectivement majestueux.

On se renseigne sur le prix du mètre carré, on envisage un crédit, peut-être lancer une cagnotte sur le web.

Les cerisiers, quand même, l’endroit je le perçois comme un lieu de passage, pas un lieu de vie. Y’a jamais personne quand on y va. Tout était mouillé, un peu pourri, un peu vivant.

J’aime bien. »

Alexis Bouvier

Le point de vue de Margot Naviaux :

« En haut de cette colline se tient une dizaine de bâtiments rectangulaires d’un blanc passé, dont les balcons sont masqués par des persiennes marron-orangé. Cette cité a été baptisée Vergoin, mais aujourd’hui, plus aucun habitant ne sait d’où a été tiré ce nom.

Les bâtiments sont bordés d’un côté par une route longeant la cité, d’un autre par une école que fréquentent les enfants du quartier dont les cris et les rires égayent à intervalle régulier le silence des journées vergoinaises.

L’arrière des bâtiments donne sur une prairie d’un vert touffu en ce début de printemps : l’herbe repousse trop vite pour que l’on puisse appeler ça du gazon, sans doute à cause de la source souterraine traversant la prairie. Cette prairie est piquée de pâquerette et de pissenlit où bourdonnent des hannetons, les abeilles étant trop affairées à butiner le grand chèvrefeuille.

D’autres arbres offrent leurs ombres aux habitants : divers pins et feuillus verts et rouges rivalisent de feuillages et d’épines.

Mais le plus intéressant restent les dix-huit cerisiers récemment replantés, à peine plus haut qu’un homme, protégés par de petits enclos et un maillot de canisse, ils semblent paisibles, mais déjà l’on voit pointer les premiers fruits, aussi verts et croquants que les feuilles. Ils sont là comme témoins d’un ancien temps, où le terrain entier appartenait encore aux riches agriculteurs, dont la grande et belle propriété borde le dernier côté de la cité. Les cerisiers étaient alors partout, régnaient en maître sur le terrain, grand et majestueux, mais si fragiles que les enfants téméraires finissaient par en tomber, et que la seule solution alors fût de les abattre pour mettre fin aux querelles de voisinage.

Ces derniers arrivés, petits et inoffensifs, ne devrait attirer l’attention que grâce à leurs fruits rouges vifs quand l’heure sera venue. Mais pour l’instant, en cette heure encore matinale, la cité est calme, paisible, et l’air charrie la rosée et le parfum du tilleul. Un banc nous tend les bras »

Margot Naviaux

Le point de vue d'Alice Palmieri :

« La cerisaie du Vergoin pour la 3, 4ème fois ? Je ne sais plus. Il fait chaud. Comme à chaque fois que je viens ici, le soleil brille. Tout est vert autour de nous. Entre les arbres, on distingue à peine les grandes barres d’immeuble de la cité, on aurait du mal à croire qu’un tel lieu existe.

L’endroit est calme et silencieux loin de l’image que l’on se fait généralement des quartiers HLM, seul quelques rires et cris d’enfants nous parviennent de l’école d’à côté. Pourtant, une fois encore, elle me semble bien pauvre cette cerisaie à côté des immenses étendues d’arbres gigantesques que j’imagine chez Tchekhov. Et je vois mal comment cet espace a pu être le centre névralgique du quartier. Tout est si calme aujourd’hui, rarement nous y croisons des gens, les enfants ne viennent plus y jouer et la pente du terrain n’invite pas vraiment à s’y installer. Comment y mettre des tables ? Des chaises ?

Malgré tout, j’aime bien cet endroit, je le trouve reposant. Les petits cerisiers sont exactement a la bonne hauteur pour une cueillette, même pas besoin d’escalader.

C’est moins drôle mais plus pratique.

Malheureusement, elles sont encore vertes. Il faudra revenir. Nous nous dirigeons lentement vers le Ginkgo Biloba, cet arbre immense dont on nous a tant parlé. »

Alice Palmieri

Le point de vue de Raymonde Palcy :

« Des cerisiers le plus souvent sagement alignés, contrastant avec un terrain en pente douce partant dans tous les sens. D’ailleurs, certains cerisiers se rebellent et leurs cerises tombent malades. Ils sont sous la coupe de grands arbres qui semblent les protéger ou les surveiller qui sait ? Ils sont pourtant bien enfermés dans leurs cadres de bois mais aussi bien savent-ils que les cadres sont faits pour être brisés, transgressés … Et alors là ! Si le vent souffle en tempête peut être qu’une ou plusieurs de leurs cerises se détacheront pour aller regarder ces grands arbres sous leurs nez avant de s’enfoncer à leurs pieds et faire fleurir un de ces étés un autre cerisier.

Ils sont majestueux aussi ces conifères ; pins divers, sapins et il n’y a pas que les cerisiers qui les regardent de haut. La pelouse parsemée chichement de pâquerettes maigrichonnes et de fleurs rachitiques, l’arbre fleuri qui prend de l’avance sur les fleurs de cerisiers pour être la vedette avant eux. Et les bâtiments dans tout ça ? Les hauts, les longs, les neufs et les anciens, les jolis, les laids et les sans âme...

On les oublie et pourtant ils sont là pour rappeler que tout le monde n’est pas logé à la même enseigne. Et peut-être que toute cette verdure est là pour nous endormir, nous faire oublier les inégalités »

Raymonde Palcy

Le point de vue d'Amaëlle Wane :

« Nous étions six. Six personnes qui se connaissent encore peu. Nous sommes partis explorer la cerisaie du Vergoin. Bien que nous étions nombreux, à peine avais-je mis un pied dans l’herbe que je me suis sentie aspirée par le vent abondant qui m’entourait. Me retrouvant ainsi seule en tête à tête avec la nature. La rosée ou plutôt la pluie qui était tombée un jour plus tôt, s’imprégnait dans la toile de mes baskets. J’ai d’abord voulu faire attention à ne pas me retrouver les pieds mouillés. Solène nous avait justement demandé plus tôt si nous avions des chaussures étanches avant de s’embarquer à la Cerisaie. Ce qui n’était pas mon cas.

Puis un souvenir me traversa l’esprit. J’étais là en dialogue avec la nature, commençant à m’inquiéter pour mes pieds. Quand soudain une image des enfants indigènes que j’avais rencontré 4 mois plus tôt. C’était celle où nous étions partis dans la jungle amazonienne et qu’ils s’étaient retrouvés trempés suite à une averse. Ce qui me frappa était leur indifférence à cette sensation désagréable qu’on peut avoir quand on se retrouve trempé de la tête aux pieds. Ce souvenir interrompit mon inquiétude pour laisser place aux sensations que m’offrait l’espace dans lequel je me trouvais. Deux pies ce prenaient le bec sous les échos des rires et des cris des jeunes écoliers que l’on pouvait apercevoir. J’étais absorbée par les abeilles et les bourdons qui butinaient les fleurs, les arbres. »

Amaëlle Wane


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